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mardi 1 août 2017

wood-wide-web



Architecture of the wood‐wide web: Rhizopogon spp. genets link multiple Douglas‐fir cohorts

Spatially explicit network model showing linkages between interior Douglas‐fir trees via shared colonization by Rhizopogon vesiculosus and Rhizopogon vinicolor genets. Circles represent tree nodes, sized according to the tree’s diameter, and coloured with four different shades of yellow or green that increase in darkness with increasing age class. Lines represent the Euclidean distances between trees that are linked. Line width increases with the number of links between tree pairs (i.e. repeated links through multiple fungal genets). An arrow points to the most highly connected tree, which was linked to 47 other trees through eight R. vesiculosus genets and three R. vinicolor genets inside the plot. Some tree nodes and their links may be obscured by overlapping features.

Explication de Suzanne Simard lors d'un Ted talk (2016) :
"Comme tout réseau, les réseau mycorhiziens ont des nœuds et des liaisons. Nous avons créé cette carte en examinant les courtes séquences d'ADN de chaque arbre et chaque champignon dans une parcelle de forêt où il y a des pins de Douglas. Dans ce schéma, les cercles représentent les pin de Douglas, ou les nœuds, et les lignes représentent les interconnexions fongiques, ou les liaisons.

Les nœuds les plus gros et les plus foncés sont les plus importants. Nous les appelons arbres concentrateurs, ou, plus affectueusement, les arbres mères car ces arbres concentrateurs nourrissent les jeunes arbres, ceux qui poussent dans les sous-bois. Si vous voyez ces points jaunes, ce sont les jeunes plants qui se sont installés dans le réseau des vieux arbres mères. Dans une forêt, un arbre mère peut être connecté à des centaines d'arbres. Grâce à nos traceurs isotopes, nous savons que les arbres mères envoient leur excès de carbone aux plus petits plants via le réseau mycorhizien. Nous estimons que cela augmente les chances de survie des plants par quatre.

Nous favorisons tous nos propres enfants, et je me suis demandé si le pin de Douglas reconnaissait les siens, comme la mère grizzly et ses petits. Nous avons mis en place une expérience et avons cultivé des arbres mères avec des plants de la même espèce et d'autres espèces. Il s'avère qu'ils reconnaissent les leurs. Les mères arbres colonisent les leurs avec des réseaux mycorhiziens plus grands. Ils leur envoient plus de carbone via le sous-sol. En terme de racines, ils réduisent même la compétition pour laisser de l'espace vital à leurs enfants. Quand les arbres mères sont blessés ou mourants, ils envoient des messages de sagesse à la nouvelle génération de plants. Le traçage par isotope a permis de tracer le déplacement du carbone d'un arbre mère blessé le long de son tronc, vers le réseau mycorhizien et vers les jeunes plants alentour, pas seulement le carbone mais aussi les signaux de défense. Ces deux composants ont augmenté la résistance des jeunes plants aux stress futurs. Les arbres se parlent !
Au travers de conversations bidirectionnelles, ils augmentent la résistance de toute la communauté. Cela vous rappelle probablement nos propres communautés sociales et nos familles, enfin au moins certaines.

Les forêts ne sont pas juste un ensemble d'arbres, ce sont des systèmes complexes avec des hubs et des réseaux qui se chevauchent, connectent les arbres et leur permettent de communiquer, leur fournissent des voies de rétroaction et d'adaptation et c'est cela qui rend la forêt robuste : le grand nombre d'arbres concentrateurs et de réseaux se chevauchant. Mais elles sont aussi vulnérables, vulnérables non seulement aux perturbations naturelles comme les dendroctones qui préfèrent attaquer les gros arbres mais aussi l'exploitation forestière et les coupes claires. Vous pouvez ôter un ou deux arbres concentrateurs mais il y a une limite à respecter car les arbres concentrateurs ressemblent aux rivets d'un avion : vous pouvez en enlever un ou deux et l'avion continuera de voler, mais si vous en enlevez un de trop ou celui qui maintient les ailes, tout le système s'effondre."


Beiler, K.J., Durall, D.M., Simard, S.W., Maxwell, S.A., Kretzer, A.M., 2010. Architecture of the wood-wide web: Rhizopogon spp. genets link multiple Douglas-fir cohorts. New Phytologist 185, 543–553.

Simard Suzanne,2016. Ted talk : https://www.ted.com/talks/suzanne_simard_how_trees_talk_to_each_other?language=fr
(Translated by Morgane Quilfen, Reviewed by Amélie Montagne)




lundi 16 janvier 2017

méthodes de recherche



méthodes de recherche en sociologie des sciences

"postulats fondamentaux

1/tout dans la science - résultats, faits, théories - est le fruit d'uns construction sociale, [...] nous considérons les choses comme le fruit de l'action collective

2/l'information scientifique s'édifie à même les négociations que mènent entre eux des acteurs travaillant dans un contexte organisationnel

3/ nous ne distinguons pas le contenu intellectuel de son contexte organisationnel [...] les scientifiques peuvent plus aisément, en cas d'imprévu, mettre en place des problèmes faisables et les résoudre. S'il y a pénurie, ils se voient contraints de réorganiser leur travail et, partant, la structure de leurs problèmes.

travaux analogues (CSI /Mines/Paris):

1/la formation des réseaux (l'enrôlement des alliés)

2/ les formes de codage des informations (les inscriptions)

3/ les alliances et les interactions jouent pour toutes sortes de catégories d'acteurs, qu'ils soient humains, souris ou microbes.


problématiques rencontrées

1/ la re-présentation

La "re-représentation" est le pivot de notre travail sur les représentations. Les scientifiques préparent des échantillons, tracent des diagrammes, établissent des graphiques et bâtissent des modèles pour représenter les phénomènes naturels. Cette représentation, ils l'élaborent au travers d'une suite d'étapes dont chacune modifie, d'une façon ou d'une autre, la précédente.

Les transformations que subissent les spécimens de zoologie illustrent bien ce qu'est une chaîne de re-représentations.

par la force des choses, les représentations sont partielles

des groupes confrontés à des situations différentes auront des perspectives différentes et tiendront, sur les phénomènes, des discours différents : ils donneront des représentations diverses de la nature ou de la société

les inscription peuvent s'accoler. Ainsi juxtaposées, elles permettent aux scientifiques de les comparer, de les combiner et d'y voir ainsi des relations qu'ils ne pourraient appréhender autrement. Un tel amalgame d'inscriptions constitue un "centre de calcul".

2/ la pratiques et la faisabilité

3/ les anomalies

4/ les réalignements, les croisements et les effets d'entraînement

5/ les ruptures de perspective"


Fujimura, J. H., Star, S. L., & Gerson, E. M. (1987). Méthodes de recherche en sociologie des sciences: travail, pragmatisme et interactionnisme symbolique. Cahiers de recherche sociologique, 5(2), 63-83.

samedi 14 janvier 2017

étiqueter le loup


"la stabilisation de l’identité du loup n’est construite que chemin faisant" : c’est une infrastructure invisible qui équipe l’indice de présence (poils et fèces du loup). Cela lui permet de jouer un rôle d'objet-frontière dans la coordination des divers acteurs qui ont parfois des pratiques et des intérêts divergents


Granjou Céline et Mauz Isabelle , « Quand l'identité de l'objet-frontière se construit chemin faisant » Le cas de l'estimation de l'effectif de la population de loups en France, Revue d'anthropologie des connaissances, 2009/1 Vol. 3, n° 1, p. 29-49.


"Nous voyons ainsi que des objets intermédiaires peuvent devenir des objets-frontière notamment lorsqu’ils sont équipés, par exemple, de métadonnées, qui rendent possible la constitution d’une équivalence entre des mondes hétérogènes. Cet équipement matérialise dans l’interaction une infrastructure invisible faite de standards, de catégories et de conventions qui permet la circulation d’un monde à l’autre."[...]

"La notion d’équipement permet d’éviter de penser que les caractéristiques de médiation, de traduction, sont attachées à la seule nature de l’objet. Nous faisons l’hypothèse que le passage de l’objet intermédiaire à l’objet-frontière tient justement à ce travail d’équipement. Équipé, l’objet intermédiaire entre dans un espace suffisamment commun à plusieurs mondes sociaux. Dès lors, la structure minimale reconnaissable par les membres de différents mondes serait l’équipement dont l’objet est doté plus que l’objet lui-même. "

Vinck, D. (2009). De l'objet intermédiaire à l'objet-frontière. Revue d'anthropologie des connaissances, 3(1), 51-72.


"[L]es groupes sociaux créent la déviance en instituant des normes dont la transgression constitue la déviance, en appliquant ces normes à certains individus et en les étiquetant comme des déviants".

Becker Howard, 1985. Outsiders. Études de sociologie de la déviance. Paris, Métaillé, 248.

"La “définition de la situation” - grande contribution de W.I. Thomas au vocabulaire et à la pensée sociologique - exige, par exemple, que nous comprenions la manière dont les acteurs voient la situation dans laquelle ils sont impliqués, et que nous découvrions comment ils définissent eux-même ce qui est en train de se passer, afin de comprendre ce qui entre en jeu dans la production de leur activité.

Becker, H. S. (2002). Les ficelles du métier: comment conduire sa recherche en sciences sociales. La découverte.

« Nous ne savons pas de quoi se compose le monde. Ce n'est pas une raison pour ne pas commencer. Car d'autres semblent le savoir et définissent constamment qui sont les acteurs qui les entourent, ce qu'ils veulent, ce qui les cause, ainsi que les moyens de les affaiblir ou de les associer. Les auteurs que nous allons étudier attribuent des causes, datent des évènements, dotent leurs entités de qualités, classent les acteurs. L'analyste n'a pas à en savoir plus qu'eux, il n'a qu'à commencer, en un point quelconque, par enregistrer sans être raisonnable ce chaque acteur dit des autres[...]
Il suffit qu’on ne sache pas quels sont les acteurs, qu’on les laisse s’entre-définir et qu’on suive comment chacun déplace la volonté des autres, en construisant des chaînes de traduction ».
 

Latour, B. (2001). Pasteur: guerre et paix des microbes; suivi de Irréductions. La découverte.

"Tout se passe comme si l'on disait aux acteurs :“Nous n'allons pas essayer de vous discipliner, de vous faire coller à nos catégories ; nous allons vous laisser déployer vos propres mondes ; ce n'est qu'ensuite que nous vous demanderons d'expliquer comment vous êtes arrivés à les établir.” Autrement dit, la tâche de définition et de mise en ordre du social doit être laissée aux acteurs eux-mêmes, au lieu d'être accaparée par l'enquêteur". 

"Un bon texte met au jour des réseaux d'acteurs lorsqu'il permet à celui qui l'écrit de tracer un ensemble de relations définies comme autant de traductions."

Latour, B. (2014). Changer de société, refaire de la sociologie. La découverte.
 


mardi 9 août 2016

le programme "faire paître le bétail" et sa traduction paysagère

dans la Vallée des Roses du massif du M'Goun marocain, aussi bien que sur le plateau tibétain du Sichuan, les buissons d'épineux permettent d'isoler les cultures qui sont pratiquées sur les colluvions, et de les protéger de l’appétit vorace des troupeaux nomades des alentours, qu'il s'agisse des chèvres au Maroc ou des yacks au Tibet.

bien que dans certains endroits, l'arbre fut au néolithique employé comme fourrage (Thiébault, 2005) il est vraisemblable que les prunelliers, aubépines et rosiers sauvages de nos haies furent à l'origine plantés afin de protéger les cultures des troupeaux alentours

selon Marguerie et al.(2003), de la fin du XVème à la première moitié du XIXème, la construction progressive du bocage a pour but de réguler le rapport cultures-élevage sous la pression de l'essor démographique (= parquer les animaux et protéger les espaces cultivés de la divagation des animaux).

si nous considérons le programme suivant "faire paître le bétail", différentes épreuves nécessitent de faire un pas de côté afin de contourner ces obstacles qui se présentent au fur et à mesure comme autant d'anti-programmes

à chaque détour, de nouveaux alliés biologiques, énergétiques, chimiques ou mécaniques sont sollicités

le berger conduit les troupeaux dans les herbages et évite les zones cultivées cependant qu'avec la croissance démographique une première innovation bocagère permet de clôturer les zones de cultures ; puis avec la venue de l'assolement, ce sont aussi les prairies qui se trouvent encloses par les haies

avec la révolution mécanique, l'agriculture intensive et l'arasement bocager, le berger électrique remplace l'humain, mais nécessite toujours le passage d'un faucheur pour empêcher les herbes de court-circuiter le courant et rendre ainsi le fil électrique inefficace

le faucheur se fatigue et trouve un allié dans le pulvérisateur de molécules chimiques qui élimine ces herbes indésirables

cependant, les poissons commencent à faire parler d'eux, et la baisse de leurs effectifs finit par prendre du poids dans la balance contre ces molécules : et donc, au moins sur les bordures des cours d'eau, ces molécules deviennent interdites

un support de fil avec déport est alors fixé sur le piquet afin de permettre de passer une faucheuse tractée

ces différentes innovations ou détours socio-techniques s'accumulent pour entrer dans la composition de nos paysages

schéma de la traduction d'après Latour (2010)


Latour Bruno, 2010. Cogitamus: Six lettres sur les humanités scientifiques.
Marguerie, D., Antoine, A., Thenail, C., Baudry, J., Bernard, V., Burel, F., ... & Guibal, F. (2003). Bocages armoricains et sociétés, genèse, évolution et interactions.
Thiébault, S. (2005). L’apport du fourrage d’arbre dans l’élevage depuis le Néolithique. Anthropozoologica, 40(1), 95-108.

mardi 2 août 2016

sociologie modeste

les principes de la sociologie modeste de John Law, sources :

Mougenot, C. (2003). Prendre soin de la nature ordinaire. Editions Quae.

Law, J. (1994). Organizing modernity (pp. 100-104). Oxford: Blackwell.

mercredi 27 juillet 2016

mondes lexicaux # univers de discours # mondes sociaux

"Ce modèle simplifié de représentation statistique d’un discours [Alceste] suffit à mettre en évidence, du moins dans l’analyse de certains corpus, une tendance du vocabulaire à se distribuer dans des mondes lexicaux stabilisés... Cela nous a conduit à rechercher les contenus ailleurs que dans les textes... Nous avons dû quitter l’approche des textes, conçue comme supportant des représentations, pour une approche des textes en termes de traces d’activité, traces de discours possible. Nous ne disons pas que ces traces ne permettent pas de se représenter, mais elles « représentent » aussi comme les traces de toute activité humaine." (Reinert, 2008)

"Dans  l’activité  langagière,  les  mots  pleins  constituent,  selon  nos  hypothèses,  des  traces  possibles des  contenus  de  nos  activités.  Ils  ne  sont  pas  les  signifiants  mais  bien des  traces possibles  de  ce  contenu  en  acte. Bien sûr, il existe des dictionnaires, dont on ne doit pas oublier qu’ils ne signifient rien sans un usage. Si les mots appartiennent à un bien commun, c’est d’abord par leur matérialité, c’est-à-dire dans la mesure où ils s’intègrent aux activités et usages d’une époque, d’un lieu, d’une population ; ils ne sont jamais seuls, aussi les contenus de ces usages impliquent-ils toujours des constellations de mots et de marques de toutes sortes. Les mots pleins ont cependant la faculté de susciter des contenus en tant qu’ils stabilisent nos visions du monde, mais le contenu n’est pas dans le mot ; il est dans l’acte, dont le mot est une trace. " (Reinert, 2008)

"De ce fait, le tableau de données ne reflète plus un monde d 'objets mais un monde d'usages de ces objets dont les aspects insistants marquent à la fois des centres de stabilisation des objets et des pôles de tension entre sujets." (Reinert, 1999)

Reinert, M. (2008). Mondes lexicaux stabilisés et analyse statistique de discours. Actes de la JADT 2008, 981-993.
Reinert, M. (1999). Quelques interrogations à propos de l'"objet" d'une analyse de discours de type statistique et de la réponse "Alceste". Langage et société, 90(1), 57-70.


"The universe of discourse which deals simply with the highest abstractions opens the door for the interrelationship of the different groups in their different characters. The universe of discourse within which people can express themselves makes possible the bringing-together of those organized attitudes which represent the life of these different communities into such relationship that they can lead to a higher organization. The very universality of the processes which belong to human society, whether looked at from the point of view of religion or trading or logical thinking, at least opens the door to a universal society; and, in fact, these tendencies all express themselves where the social development has gone far enough to make it possible."
George Herbert Mead. "Democracy and Universality in Society", Section 36 in Mind Self and Society from the Standpoint of a Social Behaviorist (Edited by Charles W. Morris). Chicago: University of Chicago (1934): 281-289 .

"Discourses here, then, mean these assemblages of language, motive, and meaning, moving toward mutually understood modus vivendi—ways of (inter)acting."
Clarke, A. E., & Star, S. L. (2008). The social worlds framework: A theory/methods package. The Handbook of Science & Technology Studies, 3, 113-137.


"Quoique l'idée de mondes sociaux puisse essentiellement renvoyer à des univers de discours, nous devrions être attentifs à ne pas nous confiner à la simple observation des formes de communication, de symbolisation et d'univers de discours mais aussi à examiner des faits palpables comme des activités, des appartenances, des sites, des technologies et des organisations spécifiques à des mondes sociaux particuliers"
Strauss, A. (1978). A social world perspective. Studies in symbolic interaction, 1(1), 119-128.


De son côté, Howard Becker (1982) définit le monde social comme "le réseau de tous ceux dont les activités, coordonnées grâce à une connaissance commune des moyens conventionnels de travail, concourent à la production des œuvres".
En 2006 il dit :
"Un « monde », tel que je l'entends [...] consiste en des gens réels qui essaient de faire des choses, en grande partie en préparant les autres personnes à faire des choses qui vont leur être utiles dans leur projet. Tout le monde a un projet et le résultat des négociations entre eux n'est rien d'autre que ce sur quoi ils finissent par tous tomber d'accord, chaque personne impliquée dans de telles activités devant prendre en compte la façon dont les autres répondent à ses propres actions."


Becker, H. S. (1982). Art worlds. Univ of California Press.
Becker H.S. et Pessin A., 2006.Dialogue sur les notions de Monde et de Champ. Sociologie de l'Art 2006/1 (OPuS 8), p. 163-180.

jeudi 21 juillet 2016

centre de calcul

"L'un des moyens de se faufiler [ entre deux erreurs de l'histoire des sciences et de l'histoire du capitalisme ] est se demander comment il est possible de capitaliser quoi que ce soit. Dès que cette question est posée, on s'aperçoit que les réponses ne sont pas légions ; il faut faire venir le monde en certains points qui deviennent alors des centres ou des points de passage obligé. Très bien mais sous quelle forme faire venir le monde pour que, d'une part, ce qui est loin, distant et périssable, s'y trouve assemblé, et que, d'autre part, le centre ainsi constitué ne soit pas un formidable embouteillage ? Il faut inventer des dispositifs qui mobilisent les objets du monde, maintiennent leur forme et puissent s'inspecter du regard. Il faut surtout que toutes ces formes puissent se combiner à loisir et se retravailler de telle sorte que celui qui les accumule dispose d'un surcroît de pouvoir. Alors, et alors seulement, certains points deviennent des centres capables de dominer sur une grande échelle. Dans la suite des recherches, je ne parlerai plus des lieux où se cumulent les mobiles immuables que comme des centres de calcul, sans plus m'occuper de savoir à quels domaines ces calculs ressortissent."

LATOUR, B. (1985). LES «VUES» DE L'ESPRIT. Culture technique, (14).

# le centre de calcul (observatoire, laboratoire) permet l'action à distance sur des mobiles immuables et combinables :


Latour, B. (2005). La science en action: introduction à la sociologie des sciences. La Découverte/Poche.p.534-535



Latour, B. (2005). La science en action: introduction à la sociologie des sciences. La Découverte/Poche.p.542-543


"L’accent mis sur le déplacement matériel – que nous retrouvons dans la notion de « centre de calcul » développée par Bruno Latour – nous aide à esquisser une définition très générale du calcul, comme consistant en un processus où trois étapes sont impliquées :

    Tout d’abord, afin d’être calculées, les entités prises en compte doivent être détachées : un nombre fini d’entités sont déplacées et disposées dans un espace unique  (LATOUR, 1995 ; BOWKER, STAR, 1999) . Nous devons imaginer cet espace de calcul dans un sens très large : c’est le « compte » lui-même mais également, par extension, la surface où les entités à calculer sont déplacées (littéralement ou par délégation) puis comparées et manipulées selon un principe opérationnel commun. Il est important de retenir la variété de tels espaces de calcul. Une facture, un échiquier, une usine, un écran de négociation, une salle de marché, un tableur informatique, une chambre de compensation, une mémoire d’ordinateur, un chariot de supermarché : tous ces espaces peuvent être analysés en tant qu’espaces de calcul, mais tous fourniront des formes de calcul différentes.

    Une fois mises ainsi à plat, les entités considérées (« prises en compte ») sont associées entre elles. C’est-à-dire qu’elles sont sujettes à manipulations et transformations, toujours dans un sens très matériel (des mouvements vers la gauche ou la droite, vers le haut ou le bas, des superpositions ou des juxtapositions). Appliquer une règle, dans un sens mathématique, ou utiliser un calculateur mécanique sont des cas où l’on peut facilement reconnaître ce procédé : une économie de calcul est précisément une économie de déplacements, comme celle qu’avait décrite Charles Babbage lors du célèbre épisode de sa visite à la chambre de compensation bancaire de la City de Londres  (CAMPBELL-KELLY, ASPRAY, 1996, p. 15-20) . Mais ces déplacements sont également à l’œuvre dans des situations moins mécaniques. Un arbitragiste financier, par exemple, associe matériellement deux entités (un indice et le produit dérivé correspondant, ou une société et sa cible dans le cas d’une fusion possible) en disposant leur évolution sur une même fenêtre d’écran  (BEUNZA, STARK, 2003 ; GODECHOT, HASSOUN, MUNIESA, 2000)

    Un troisième mouvement est nécessaire afin d’obtenir un calcul abouti : un résultat doit être extrait. Une nouvelle entité doit être dégagée (une somme, une liste ordonnée, une évaluation, un choix binaire, etc.), une entité qui corresponde précisément aux manipulations effectuées dans l’espace de calcul et qui, par conséquent, lie (elle récapitule ou, en anglais, summa-rizes) les entités prises en compte. Cette entité résultante n’est pas nouvelle dans le sens ou elle viendrait de nulle part : elle est préfigurée par les arrangements décrits ci-dessus. Mais elle doit pouvoir quitter l’espace de calcul et circuler ailleurs d’une façon acceptable (et sans transporter tout l’appareillage de calcul avec elle)."

Callon, M., & Muniesa, F. (2003). Les marchés économiques comme dispositifs collectifs de calcul. Réseaux, (6), 189-233.

lundi 4 juillet 2016

boite noirisation # montée en généralité


# boîte noire = machine triviale avec un seul état intérieur, un input donné produit toujours le même output, une machine triviale est prévisible et indépendante de l'histoire


# la machine non-triviale possède des états internes : son état intérieur est >1, elle est imprédictible, mais déterministe, (son résultat n'est pas le fruit du hasard) et produit des output différents pour un même input, une machine non-triviale est à la fois dépendante du passé et analytiquement imprévisible



Von Foerster, H. (2007). Understanding understanding: Essays on cybernetics and cognition. Springer Science & Business Media.

# montée en généralité :

"pour un énoncé scientifique, elle consiste à devenir immuable pour être totalement mobile, c'est-à-dire à se stabiliser définitivement, à devenir non-modifiable, à pouvoir être confirmée par des contre-épreuves indépendamment des personnes singulières qui les font et des conditions locales, toujours particulières, où elles sont faites, à pouvoir circuler sans altération possible dans le réseau des propositions sur le monde sous la forme d'une affirmation de fait quasi-absolue (au sens de : indépendante de tout point de vue d'énonciateur), en y produisant des effets d'adhésion, de croyance et d'investissement."


"Pour une machine, la montée en généralité est aussi essentielle que pour un énoncé scientifique. Elle consiste pareillement à acquérir ce statut de mobile immuable : elle doit pouvoir se répandre, sans être altérée, dans des réseaux spatiotemporels quasi-illimités. Ce qui exige que son fonctionnement opératoire ne soit pas d'une probabilité aléatoire, qu'il ne dépende pas des interventions de ses concepteurs ou des particularités de ses utilisateurs, qu'il ne réagisse pas aux conditions locales de personnes, de lieu et de temps ; elle doit être entièrement prévisible ; il faut qu'elle suscite l'adhésion de quiconque en satisfaisant l'un ou l'autre de ses intérêts, qu'elle puisse être mise en œuvre par n'importe qui moyennant quelques opérations élémentaires strictement standardisées, et qu'elle déclenche chez ses utilisateurs un certain nombre de comportements standards, etc."


Quéré, L. (1989). Les boîtes noires de Bruno Latour ou le lien social dans la machine. Réseaux, 7(36), 95-117.



vendredi 6 mai 2016

objet frontière

FUJIMURA, J., 1992, « Crafting science : standardized packages, boundary objects, and "translation", in Pickering », A., éd., Science as Practice and Culture, Chicago, University of Chicago Press.


la mise en entonnoir : vision du point de vue du « traducteur » : recadrage ou médiation des intérêts de différents acteurs au sein d’un étroit passage obligé, par un processus d’intéressement >>> ça passe ou ça casse  !

"Il existe un nombre indéfini de possibilité différentes permettant, pour les entrepreneurs de chaque monde social coopérant, de transformer leur propre travail en un point de passage obligé pour l’intégralité du réseau des participants." (Star & Griesemer, 1989)

une approche plus écologique, selon différents points de vues : coexistence de plusieurs processus de traduction, avec différents alliés, qui aboutissent à un objet de structure suffisamment commune à différents mondes sociaux, permettant la cohérence des PPO : >>> mise au point d’un objet frontière

"Les objets frontière sont à la fois adaptables à différents points de vue et suffisamment robustes pour maintenir leur identité à travers eux."
(Star & Griesemer, 1989)

Un "objet frontière" (ou d’interface) est un objet marquant une frontière tout en facilitant le dialogue entre des spécialistes dans la réalisation d’un projet commun pluridisciplinaire.

Cet objet est doté de « flexibilité interprétative » ce qui veut dire qu’il n’est pas le même en fonction de l’utilisation et de l’interprétation qu’on peut en faire. La « flexibilité interprétative » de l’objet-frontière lui permet d’opérer :

>comme support de traductions hétérogènes,
>comme dispositif d’intégration des savoirs,
>comme médiation dans les processus de coordination d’experts et de non-experts, etc.

Star, S. L., & Griesemer, J. R. (1989). Institutional ecology,translations’ and boundary objects: Amateurs and professionals in Berkeley’s Museum of Vertebrate Zoology, 1907-39. Social studies of science, 19(3), 387-420.
version française in Bernard Lahire, Claude Rosental2008, La cognition au prisme des sciences sociales Archives contemporaines

méthode et principes de la théorie de l'acteur réseau


Latour, B. (2005). La science en action: introduction à la sociologie des sciences. La Découverte/Poche.


Le point de vue théorique et méthodologique défendu peut être résumé en six affirmations :


1. il faut analyser la science et la technique en train de se faire, plutôt qu’une fois faites ;


2. ce qu’on découvre depuis cette perspective ce sont des stratégies d’acteurs : celles d’hommes de science et d’ingénieurs qui construisent des boîtes noires - faits scientifiques ou machines - donnant l’illusion d’exister comme réalités autonomes,    d’avoir une stabilité et de se répandre par elles-mêmes en vertu d’une sorte d’énergie interne ;


3. la construction de telles boîtes noires consiste en des opérations de liaison et d’assemblage, de constitution et de stabilisation de réseaux, d’affaiblissement et de renforcement des multiples associations dont ces réseaux sont faits ;
elle est sociale dans la mesure où elle instaure, conforte et stabilise des liens ;


4. la distinction qui est habituellement établie entre science et technique ne tient pas, car dans un cas comme dans l’autre on a fondamentalement affaire aux mêmes processus et aux mêmes opérations ; il s’agit d’un seul phénomène qu’on peut appeler "technoscience" ;


5. le lien social étant dans la machine, et vice versa, il n’y a plus lieu de maintenir la distinction habituelle entre l’objet technique et le monde social - ce ne sont là que deux fictions corrélatives - ni de concevoir l’innovation comme émergence et diffusion dans un milieu socioculturel, à consistance propre, de quelque chose qui serait en soi dépourvu de socialité et de culture ;


6. l’innovation n’est rien d’autre qu’un processus de construction de chaînes d’associations et d’organisation de réseaux stables par des machinations, par des opérations d’enrôlement et de contrôle qui masquent leur véritable nature de domination.


Quéré Louis. Les boîtes noires de Bruno Latour ou le lien social dans la machine. In: Réseaux, 1989, volume 7 n°36. pp. 95- 117.

dimanche 6 mars 2016

rhizome

intermédiaires circulant au sein de l'actant-rhizome ou acteur-réseau (Callon, 1991)

extrait de

Gilles Deleuze, Félix Guattari -
Mille plateaux: Capitalisme et schizophrénie, 2

mardi 9 juin 2015

objet technique

"les objets techniques ont un contenu politique au sens où ils constituent des éléments actifs d'organisation des relations des hommes entre eux et avec leur environnement. Les objets techniques définissent dans leur configuration une certaine partition du monde physique et social, attribuent des rôles à certains types d'acteurs - humains et non-humains - en excluent d'autres, autorisent certains modes de relation entre ces différents acteurs etc... de telle sorte qu'ils participent pleinement de la construction d'une culture, au sens anthropologique du terme, en même temps qu'ils deviennent des médiateurs obligés dans toutes les relations que nous entretenons avec le "réel".

[...] Le sociologue des techniques se trouve devant un objet qui, bien que clairement défini dans son aspect physique, n'en est pas moins curieusement insaisissable: les objets techniques se donnent d'emblée comme composites, hétérogènes; mi-chair, mi-poisson, on ne sait par quel bout les prendre. Ils renvoient toujours à une fin, une utilisation pour laquelle ils sont conçus, en même temps qu'ils ne sont qu'un terme intermédiaire sur une longue chaîne qui associe hommes, produits, outils, machines, monnaies...

[...] il suffit de considérer les objets les plus banaux qui nous entourent pour constater que leur forme est toujours le résultat d'une composition de forces dont la nature est des plus diverse. La résistance des matériaux qui sont utilisés pour la construction des voitures est en rapport avec la violence supposée des chocs qu'ils peuvent avoir à subir, lesquels chocs sont liés à la vitesse des véhicules, qui elle-même est le résultat d'un compromis complexe entre performances des moteurs, réglementation en vigueur, moyens mis en œuvre pour la faire respecter, valeur attribuée aux différents comportements individuels... En retour, l'état d'une carrosserie devient ce par quoi on (les experts des assurances, la police, les badauds etc) évalue la conformité d'un comportement à la norme dont elle est une matérialisation.

Nous voyons déjà sur ce petit exemple que l’objet technique est la mise en forme et la mesure d’un ensemble de relations entre des éléments tout à fait hétérogènes."

"[...] nous nous attacherons à mettre en évidence les mécanismes élémentaires d’ajustement réciproque de l’objet technique et de son environnement. Par la définition des caractéristiques de son objet, le concepteur avance un certain nombre d’hypothèses sur les éléments qui composent le monde dans lequel l’objet est destiné à s’insérer. Il propose un « script », un « scénario » qui se veut prédétermination des mises en scène que les utilisateurs sont appelés à imaginer à partir du dispositif technique et des prescriptions (notices, contrats, conseils...) qui l’accompagnent. Mais tant qu’il ne se présente pas d’acteurs pour incarner les rôles prévus par le concepteur (ou en inventer d’autres), son projet reste à l’état de chimère: seule la confrontation réalise ou ir-réalise l’objet technique.

Si ce sont les objets techniques qui nous intéressent et non les chimères, nous ne pouvons méthodologiquement nous contenter du seul point de vue du concepteur ou de celui de l’utilisateur : il nous faut sans arrêt effectuer l’aller-retour entre le concepteur et l’utilisateur, entre l’utilisateur-projet du concepteur et l’utilisateur réel, entre le monde inscrit dans l’objet et le monde décrit par son déplacement. Car dans ce jeu incessant de bascule, seuls les rapports nous sont accessibles: ce sont les réactions des utilisateurs qui donnent un contenu au projet du concepteur, de même que l’environnement réel de l’utilisateur est en partie spécifié par l’introduction d’un nouveau dispositif. C’est dans ce cadre que doit s’entendre le sens de la description que nous proposons, comme le recensement et l’analyse des mécanismes qui permettent cette mise en rapport entre une forme et un sens que (et qui) constitue l’objet technique."

"Le problème de la panne est assez intéressant à cet égard et mériterait qu’on s’y attarde : la panne renvoie précisément à la définition que nous avons donnée de l’objet technique puisqu’elle ne peut se comprendre qu’« en acte », comme rupture de ce rapport constitué par l’objet technique entre un dispositif matériel et un usage. Toute panne est donc une épreuve de la solidité de l’assemblage « socio-technique » matérialisé par l’objet technique, la rapidité avec la recherche des causes aboutit à un consensus donnant une mesure de cette solidité."

Akrich Madeleine, 1987. Comment décrire les objets techniques ? Techniques et Culture, 9, 49-64

"Comment un automatisme est-il vraiment automatique ? Si vous commencez à regarder les dispositifs dits automatiques, qu'il s'agisse d'un ordinateur, qu'il s'agisse d'une centrale nucléaire, ou qu'il s'agisse d'un robot ménager, en fait ils sont automatiques mais avec plein de gens autour ; et de nouveau c'est le nombre de gens, le nombre d'habitudes, le nombre de situations, le nombre de pannes, autour de ces objets qui nous intéresse."
Latour Bruno, 2011. cours Sciences Po

lundi 4 mai 2015

après la théorie de l'acteur réseau : vers une ontologie relationnelle

scirpes émergeant depuis leurs rhizomes qui colonisent la berge vaseuse d'un estuaire © Éric Collias

"La théorie de l'acteur-réseau est une application sans pitié de la sémiotique. Elle prétend que les entités prennent forme et acquièrent leurs attributs dans leurs relations avec d'autres entités. Dans ce modèle, les entités n'ont aucune qualités inhérentes : les divisions essentialistes sont jetées sur le bûcher du dualisme".

"La seconde histoire concerne la performativité. Parce que la sémiotique nous dit que les entités réalisent leur forme à partir des relations dans lesquelles elle sont situées. Mais cela signifie que cela nous dit aussi qu'elles sont performées au sein, par et à travers ces relations. Une conséquence est que tout est incertain et réversible, au moins en principe. Cela n'est jamais donné dans l'ordre des choses"

(Law, 1999)

fragment de clone de Scirpus maritimus (redessiné d’après Charpentier, 1998). 
Le Scirpe marin est une plante clonale de la famille des carex, connue pour
ses phases de bourgeonnement irrégulières. Le clone est composé d’un réseau
de tubercules  d’où émergent les ramets sexués des ramets végétatifs
(sans fleurs) et des tubercules (souterrains) nouveaux sans parties aériennes.(Collias, 2004)

"le mot réseau, ainsi que le terme rhizome de Deleuze et Guattari, signifie clairement une série de transformations -traductions, transductions- qui ne pourraient pas être capturées par aucun des termes traditionnels de la théorie sociale. Avec la récente popularisation du mot réseau, il signifie désormais un transport sans déformation, un accès instantané à chaque unité d'information. C'est exactement l'opposé de ce que nous avons voulu dire."

"peut-être le social possède-t-il la propriété bizarre d'être une entité circulante"

"ANT concentre l'attention sur un mouvement :

- quelque chose comme la somme des interactions de différentes sortes d'objets, d'inscriptions, formes, formules, au sein d'un lieu très petit, très local et très pratique. [...] Grand ne signifie pas réellement grand ou dominant ou surplombant, mais connecté, proche, local, médié, relié.

- l'actantialité n'est pas ce qu'un acteur effectue, mais ce que produisent les actants avec leurs actions, avec leur subjectivité, avec leur intentionnalité, avec leur moralité. [...] il n'y a rien de spécialement local, et rien de spécialement humain dans une rencontre intersubjective. J'ai proposé 'interobjectivité' comme mode d'énonciation de la nouvelle position de l'acteur.

- en suivant le mouvement tel que le permet l'ANT, nous ne sommes jamais conduits à étudier l'ordre social, dans un déplacement qui permettrait à un observateur de zoomer du global au local et du local au global.

- d'avoir transformé le social depuis ce qui était une surface, un territoire, en une circulation, fut je pense la contribution la plus utile de l'ANT."[...] si il n'y a pas de zoom allant de la macro structure aux micro interactions, si à la fois micro et macro sont des effets locaux de la manière de capturer des entités circulantes, si les contextes affluent dans des conduits étroits, cela signifie qu'il subsiste beaucoup d'espace entre les réseaux".

(Latour 1999)

système rhizomial de Scirpus maritimus élaboré durant une saison 
de croissance. En noir, le tubercule de la saison précédente avec un vestige de
rhizome (a). Tous les autres tubercules et rhizomes sont de la même saison
(Zákravsky & Hroudová 1994).

Au printemps, un tubercule âgé de la saison précédente et ayant hiverné bourgeonne
et forme de nouvelles chaînes de rhizomes d’où proviennent tiges et nouveaux tubercules.
Du début à la fin de la saison Cette croissance se déroule en quatre phases
(Dykyjova et al. 1972):
1- en début de saison, les ramets utilisent les réserves d'énergie stockées dans les
tubercules,
2- les parties souterraines poussent après que la croissance des ramets soient bien
réalisée,
3- les organes de reproduction se forment quand la biomasse aérienne est maximale,
4- les substances organiques sont transportées dans les parties souterraines au moment
de la sénescence.
A la fin de l’été, la partie aérienne des tiges meurt, alors que les tubercules et les
rhizomes persistent plusieurs années dans le sol (Charpentier 1998).
"réseau peut faire référence aussi bien au maillage d'un filet qu'au tissage, au chemin d'une dentelle, au plexus du système nerveux, ou de la toile de l'araignée. Les lignes de la toile d'araignée, par exemple, à la différence des réseaux de communication, ne connectent pas des points ni ne relient les choses. Ils sont davantage filés à partir de matériaux exsudés du corps de l'araignée et déposés avec le déplacement de l'animal. Dans ce sens ils sont des extensions de l'être véritable de l'araignée alors que celle-ci chemine dans l'environnement."
(Ingold, 2010)

"nous avons affaire ici à un élément important de la pensée Iatmul. Ces indigènes conçoivent leur communauté, non pas comme un système clos, mais comme une souche qui se ramifie et prolifère indéfiniment. Un clan grossit  et se subdivise : un village grossit et établit des colonies. L'idée d'une communauté close est sans doute incompatible avec la représentation de la communauté comme quelque chose qui se divise continuellement et évacue sa progéniture 'comme le rhizome d'un lotus'."
(Bateson, 1971)

Bateson, G., 1971. La cérémonie du Naven, trad. fr.

Charpentier A., 1998. Biologie des populations d'une espèce clonale : Architecture et fonctionnement clonal chez Scirpus maritimus dans les marais temporaires méditerranéens du sud de la France. Thèse, Montpellier.

Collias,E.,2004. Cartographie de la végétation halophile et diagnostic littoral de la rade et des estuaires du Pays de Lorient. Cap l'Orient, rapport.

Dykyjova, D., P. J. Ondok, and D. Hradecka. 1972. Growth rate and development of the root/shoot ratio in reed swamp macrophytes grown in winter hydroponic cultures. Folia Geobotanica et Phytotaxonomica 7, 259-268.

Ingold, T., 2010. Bringing things to life: Creative entanglements in a world of materials. ESRC National Centre for Research Methods, NCRM Working Paper Series 1–15.

Latour, B., 1999. On recalling ANT. The Sociological Review 47, 15–25.

Law, J., 1999. After ANT: complexity, naming and topology. The Sociological Review 47, 1–14.

Zákravsky P., Hroudová Z. 1994. The effect of submergence on tuber production and dormancy in two subspecies of Bolboschoenus maritimus. - Folia Geobot. Phytotax., Praha 29: 217-226.

dimanche 3 mai 2015

acteur-réseau

"J’ai utilisé la notion d’acteur-réseau dans un travail consacré à une innovation qui est toujours pleine de promesses mais qui ne se réalise pas : le véhicule électrique. Pour expliquer l’échec, ou le succès, de cette innovation, il fallait expliquer pourquoi l’automobile à moteur thermique résistait aussi bien. La réponse était évidente. Ce qui permet à une voiture de circuler, c’est tout un complexe sociotechnique dans lequel on trouve pêle-mêle : des constructeurs d’automobile, des compagnies pétrolières avec les empires coloniaux qui leur ont permis de se développer et les guerres qui leur permettent de survivre, des connaissances métallurgiques, des modèles scientifiques pour suivre l’explosion dans les moteurs, des chaînes d’assemblages et des ouvriers spécialisés avec des bureaux d’études, des conventions collectives, une certaine forme de régulation du travail, des lois environnementales, une infrastructure routière, des permis de conduire, des systèmes de taxation, des réseaux de distribution de l’essence et du gazole, des réseaux de garages, des villes conçues pour la circulation... L’automobile équipée d’un moteur thermique prospère parce qu’est attaché à elle le monde sociotechnique dont elle a besoin, l’énorme niche écologique qui lui est nécessaire. Le véhicule électrique ne pouvait réussir que s’il était capable de construire un monde sociotechnique alternatif. C’est pour décrire le processus de la construction d’un tel monde que j’ai recouru au néologisme : acteur- réseau. Réseau parce que le véhicule électrique devait s’attacher progressivement et proprement à tous ces éléments nécessaires à sa survie et à son développement. Acteur car ce monde n’existait pas, il était à imaginer et à construire, et que cette construction ne pouvait être le fait que du réseau lui-même. Ce qui a plu dans l’expression, c’est qu’elle rendait compréhensible la combinaison de ces deux propriétés. Sa traduction ne pouvait que paraître exotique et effrayer. Avec l’acteur-réseau, les chercheurs en sciences sociales étaient en pays familier : tout le monde sait ou croit savoir ce qu’est un acteur, tout le monde sait ou croit savoir ce qu’est un réseau. L’acteur-réseau était aux sciences sociales ce que le maïs hybride a été aux sciences agricoles : le changement dans la continuité."

Callon M. et Ferrary M., Les réseaux sociaux à l’aune de la théorie de l’acteur-réseau, Sociologies Pratiques 2006/2, N° 13, p. 37-44.

jeudi 30 avril 2015

éléments pour une sociologie de la traduction

irruption des non-humains dans les sciences humaines

2001 une odyssée de l'espace © Kubrick

#1 "ce que l'on appelle le social est matériellement hétérogène"

"Ce principe est à la fois évident et difficile à mettre en œuvre. Évident, car tout le monde sait que nos sociétés dépendent de technologies, de textes et de tout le reste. Mais leur prise en charge théorique est loin d’être aisée. En pratique, nous avons tendance à les mettre entre parenthèses ou à considérer que leur statut et leur nature sont différents de ceux des êtres humains. Ce sont des ressources ou des contraintes. Ces matériaux sont en quelque sorte passifs ; ils ne deviennent actifs que mobilisés par des acteurs en chair et en os. C’est précisément cette asymétrie qui est remise en cause par ce premier principe. Les distinctions entre conversations, textes, techniques, corps sont essentielles. Mais il n’existe aucune raison a priori pour en exclure certains de la participation à la dynamique du collectif : tous ces éléments, tous ces matériaux, contribuent à la création et à la transformation de l’ordre social."

#2 "les entités sont des réseaux de matériaux hétérogènes"

"Quand on suit un scientifique en action, ou encore la conception et la fabrication d'un énoncé scientifique ou d'un artefact technique, ce que l'on observe, c'est la multiplicité des éléments qu'ils associent et dont ils sont en quelque sorte le résumé. Nous avons appelé traduction ce processus de mise en relation. Les entités qui nous entourent, qu’elles soient des êtres humains, des objets ou des textes, sont des réalités composées parce qu’elles sont le résultat d’un processus de composition."

#3 "des entités à géométrie variable qui relancent l'action"

"Les entités qui composent les collectifs sont le résultat de mises en relation, d’associations de matériaux hétérogènes. Cela signifie que leur contenu ou leurs propriétés ne sont pas fixés une fois pour toutes, qu’ils ne sont pas donnés dans l’ordre des choses. L’identité des entités résulte des interactions en cours et évolue avec elles."

"La définition de ce qui est réalisable et de ce qui ne l’est pas se décide dans l’interaction. Il n’est pas possible, avant d’en avoir éprouvé le réalisme, de savoir comment les entités vont se comporter, et cela est encore plus vrai lorsqu’il s’agit de science et de technique. "

"Dans la sociologie que nous proposons, lorsque nous disons que l’identité d’une entité se transforme, nous signifions que sa composition s’est modifiée, c’est-à-dire que le réseau dont elle est coextensive s’est transformé. Cela permet d’introduire dans l’analyse, et de manière active, tous ces non-humains sans lesquels nous serions semblables à nos frères babouins.
"

"Toute action, [...] pour s’accomplir, se prolonge dans des entités qu’elle met en forme [...] et qui à leur tour agissent, débordant – tout en la relayant – l’action initiale à laquelle elles ne sauraient être pourtant purement et simplement réduites."

#4 "des entités distribuées qui sont aussi des points"

"Une entité qui a réussi à acquérir ainsi une identité stabilisée, une enveloppe qui lui est propre, est une entité qui est en mesure de représenter le réseau des éléments qui l’ont constituée – nous disons : de traduire les différents matériaux dont elle est l’assemblage. Elle les ponctualise. Plus besoin de renégocier."

"Le réseau redevient apparent dès que les éléments qui le composent agissent de manière imprévisible."

"Pour découvrir cette double nature des entités, à la fois points et réseaux, il suffit de suivre le procès de leur configuration et de leur (éventuelle) stabilisation. Au lieu de considérer les entités comme des réalités séparées les unes des autres, éventuellement coordonnées par des règles ou des conventions, il faut les voir comme représentant des réseaux d’éléments hétérogènes, chaque élément étant à nouveau un réseau. Seul compte alors le processus historique de constitution des entités, c’est-à-dire la dynamique de leur ponctualisation et de leur déploiement."

#5 : "des collectifs actifs"

"Une des conséquences les plus contre-intuitives de l’analyse proposée est que non seulement les entités mais également les classes d’entités sont des effets ou des résultats. Des distinctions comme celles entre agents humains individuels, objets ou collectifs, ne sont pas inscrites dans l’ordre des choses."

"Chacune de ces variétés de collectifs devrait pouvoir être caractérisée par une configuration particulière. La capacité d’action stratégique, par exemple, ou plutôt ce que l’on peut appeler de manière plus générale la réflexivité, c’est-à-dire l’aptitude à caractériser une situation, à l’analyser et à agir sur elle, suppose des agencements de matériaux dans lesquels, comme l’a montré la sociologie des sciences, les textes, les inscriptions, les plans, bref tous les éléments à la fois malléables et capables de circuler, jouent un grand rôle."

#6 : "vers une sociologie des collectifs hybrides"

1•"Les non-humains ne peuvent être considérés comme de simples ressources ou contraintes.

2•"Cette participation des non-humains à l’action conduit à concevoir les entités comme des réseaux."

3•"La définition de l’entité comme un réseau associant des éléments humains et non humains – tous actifs – conduit à souligner la double dimension de l’action."

4•"Pour comprendre la dynamique de l’action ou de ce qu’il serait plus juste d’appeler les séquences d’actions, l’analyse proposée rétablit la nécessaire symétrie entre humains et non-humains."

Callon, M., Law, J., 1997. L’irruption des non-humains dans les sciences humaines: quelques leçons tirées de la sociologie des sciences et des techniques. Recherches 99–118.

mercredi 22 avril 2015

macro versus micro

"Petite échelle/grande échelle : la notion de réseau nous permet de dissoudre la distinction macro/micro qui plombe la théorie sociale depuis ses débuts. L’intégralité de la métaphore d’échelle partant de l’individu à l’état nation, à travers la famille, la parenté élargie, les groupes, les institutions, etc. est remplacée par la métaphore de la connexion. 

Un réseau n’est jamais plus gros qu’un autre, il est simplement plus long ou plus intensément connecté. [...]

Au lieu d’opposer le niveau individuel à la masse, ou l’agentivité à la structure, nous suivons simplement la manière dont un élément donné devient stratégique à travers le nombre de connexions  qu’il établit et de quelle manière il perd de l’importance quand il perd ses connections."


Latour Bruno, 1996. On actor-network theory. A few clarifications plus more than a few complications, Soziale Welt, vol. 47, pp. 369-381.

le réseau contre la tyrannie des géographes


"Éloigné/proche : le premier avantage à penser en termes de réseaux est que nous nous débarrassons de la tyrannie de la distance ou de la proximité ; des éléments qui sont proches quand ils sont déconnectés peuvent être infiniment distants si leurs connexions sont analysées ; au contraire, des éléments qui apparaîtraient infiniment distants pourraient être proches quand leurs connexions sont mise en évidence.[...]

La notion de réseau nous aide à nous débarrasser de la tyrannie des géographes dans la définition de l’espace et nous offre une notion qui n’est ni sociale, ni ’réellement’ spatiale, mais composée d’associations."

Latour Bruno, 1996. On actor-network theory. A few clarifications plus more than a few complications, Soziale Welt, vol. 47, pp. 369-381.

mardi 21 avril 2015

l’école française de sociologie des sciences

l’école française de sociologie des sciences

(extrait de VINCK, D., 1991. Gestion de la Recherche: Nouveaux Problèmes, Nouveaux Outils, sous la coordination de VINCK D. De Boeck Université, Bruxelles 7, pp 14-16 )

"Les lignes de force de cette école de pensée peuvent être résumées de la manière suivante :

1. Étendre l’agnosticisme de l’observateur aux sciences sociales elles-mêmes. Il s’agit d’éviter de porter des jugements sur la façon dont les acteurs analysent leur société exactement comme le sociologue des sciences s’abstenait de porter un jugement sur les arguments scientifiques et techniques des acteurs qu’il étudie. Il s’agit donc de ne privilégier aucun point de vue sur les acteurs et d’enregistrer les incertitudes qui portent sur leur identité lorsqu’elle est controversée.

2. Le principe de symétrie généralisée de CALLON (extension du principe de symétrie de BLOOR). Il ne s’agit plus seulement d’expliquer, dans la même manière, les connaissances acceptées et les croyances rejetées. Il faut aussi rendre compte, dans les mêmes termes, des aspects techniques et des aspects sociaux. De nombreux répertoires peuvent être utilisés, à condition de ne pas en changer lorsqu’on passe d’un aspect à l’autre, par exemple, d’une innovation qui réussit à une autre qui échoue, des aspects techniques aux aspects sociaux.

3. Utiliser la libre association. Il s’agit de repérer comment les acteurs définissent et associent les différents éléments, sans imposer de grille d’analyse préétablie et de grandes distinctions a priori. L’observateur doit enregistrer l’inventaire des catégories utilisées, des entités mobilisées et des relations dans lesquelles elles entrent ainsi que de leurs remises en question permanentes. Il s’agit de rendre aux acteurs leur marge de manœuvre.

4. La théorie de la traduction (CALLON, 1976, 1982a, 1986a) et des réseaux. Il s’agit du répertoire proposé par l’école française conformément au principe méthodologique exposé au point 2 ci-avant.

— La traduction est un processus général par lequel un monde social et naturel se met progressivement en forme et se stabilise. Elle souligne la permanence des déplacements opérés. Elle permet de suivre comment les différents acteurs, notamment les scientifiques et les ingénieurs, sont constamment occupés à redéfinir et à reconstruire la société et le monde en introduisant des associations nouvelles (9). L’identité des acteurs, humains ou non-humains, leur taille et leurs intérêts sont constamment négociés tout au long du processus de traduction ; il n’y a pas de monde pré-défini. Ainsi, les acteurs décrivent un système d’alliances ou d’associations (CALLON, 1981b) entre des entités dont ils définissent à la fois l’identité, les problèmes qui s’interposent entre elles et ce qu’elles veulent. Ils définissent un acteur-monde (CALLON, 1986b) (un ensemble de problèmes et d’entités au sein duquel un acteur se rend indispensable) sans lequel aucune entité (par exemple, un objet technique) ne peut être comprise. Il s’agit ensuite de stabiliser l’identité des différentes entités et leurs liaisons en mettant en place des dispositifs d’intéressement pour interrompre les associations concurrentes (10).

— A l’idée de traduction est aussi liée celle de mobilisation d’alliés : celle-ci consiste à rendre mobiles des entités qui ne l’étaient pas. Par la désignation de porte- paroles et par la mise en place d’une cascade d’intermédiations et d’équivalences, toute une série d’acteurs sont déplacés et rassemblés en un point. Par la sélection de porte-paroles (échantillon de population, modèle animal, délégation syndicale, ratios comptables), c’est-à-dire d’entités qui parlent au nom des autres et donc qui font taire celles-ci, la mobilisation contribue à réduire le nombre d’interlocuteurs représentatifs, à convertir des entités nombreuses et hétérogènes en un plus petit nombre d’entités plus homogènes et plus facilement contrôlables (investissement de forme (THEVENOT, 1985). Certaines entités acquièrent ainsi de la force parce qu’elles réussissent à en mobiliser de nombreuses autres et à se les allier. La mobilisation se matérialise par toute une série de déplacements, de simplifications et de juxtapositions qui conduit à ponctualiser (à transformer en un point ou en une boîte noire (CALLON, 1981, LAW, 1984) un réseau d’entités solidement liées entre elles.

— Lorsqu’une traduction est réussie, elle prend la forme d’un réseau (11) contraignant pour les entités en présence. Alors qu’au début d’une traduction, un acteur avançait des hypothèses sur l’identité d’autres acteurs, leurs relations et leurs objectifs, — il composait son acteur-monde, unifié et auto-suffisant — à l’issue du processus, un réseau de liens les contraint et constitue un acteur-réseau avec ses points de passage obligés. Les éléments de l’acteur-réseau sont hétérogènes et mutuellement définis au cours de leur association.

— L’acteur-réseau a sa propre structure constamment susceptible de changer. Les réseaux et les porte-paroles sont toujours contestables. “De la traduction à la trahison, il n’y a souvent qu’un pas”. De nouveaux déplacements peuvent détourner les acteurs des points de passage obligés qui leur avaient été imposés. Les porte-paroles peuvent être dénoncés, les liaisons défaites, les réseaux se disloquer et s’irréaliser : rien n’est irréversible. Du même coup la description de la réalité sociale et naturelle se remet à fluctuer. Il n’y a plus superposition des descriptions d’un acteur à l’autre. Des controverses, par lesquelles est remise en cause, discutée, négociée ou bafouée la représentativité des porte-paroles, éclosent."

9 : Ainsi, par exemple, des chercheurs, ayant analysé le développement des techniques (LAW, 1987a, 1988a,b), ont montré que de nombreuses distinctions a priori sont non-pertinentes. Il s’agit, notamment, de la délimitation entre ce qui est acquis et ce qui ne l’est pas, entre science fondamentale et appliquée, entre facteurs sociaux et techniques, entre les acteurs participant aux controverses et les autres, entre contenus et contextes, etc.
10 : De nombreuses études ont montré qu’il était possible d’analyser l’argumentation scientifique comme un dispositif d’intéressement : CALLON, 1983, 1984, 1986b, LAW, 1982, 1983, LATOUR, 1984.
11 : La notion de réseau est utilisée pour rendre de compte des associations entre des entités hétérogènes.

CALLON M.(1976), L’opération de traduction comme relation symbolique, in P.Roqueplo, Incidences des rapports sociaux sur le développement des sciences et des techniques, Cordes, 1976
CALLON M. (1981b), LATOUR B., Unscrewing the Big Leviathan : how actors macrostructure reality and how sociologists help them to do so, in Knorr- Cetina K., Cicourel A., Advances in Social Theory and Methodology : Toward an Integration of Micro and Macro-sociologies, Routledge and Kegan Paul, London, 1981
CALLON M. (1982a), LAW J., On Interests and their transformation : Enrolment and Counter-Enrolment, Social Studies of Science, 12(4), 1982, pp 615-625
CALLON M. (1982b), LATOUR B., éds., La science telle qu’elle se fait. Anthologie de la sociologie des sciences de langue anglaise, éd.Pandore, Paris
CALLON M.(1983), BAUIN S., COURTIAL J.P., TURNER W., From translation to Problematic Networks : an Introduction to Coword Analysis, Social Science Information, 22, 2, pp 191-235.
CALLON M. (1984), BASTIDE F., BAUIN S., COURTIAL J.P., TURNER W., Les mécansimes d’intéressement dans les textes scientifiques, Cahiers STS-CNRS, 4, pp 88-105
CALLON M.(1986a), Eléments pour une sociologie de la traduction. La domestication des coquilles Saint-Jacques et des marins-pêcheurs dans la baie de Saint-Brieuc, L’année sociologique, n° 36, pp 169-208
CALLON M. (1986b), J.LAW, A.RIP, Mapping the dynamics of science and technology, The MacMillan Press, London
LATOUR B. (1984), Les microbes, Guerre et Paix, suivi de Irréductions, éd.A.M.Métailié, Paris
LAW J. (1982), WILLIAMS R., Putting facts together : a Study in Scientific Persuasion, Social Studies of Science, 12, pp 535-558
LAW J. (1983), Enrôlement et contre-enrôlement : les luttes pour la publication d’un article scientifique, Social Science Information, 22, 1983, pp 237-251
LAW J. (1984), A propos des tactiques du contrôle social : une introduction à la théorie de l’acteur-réseau, La légitimité scientifique : Cahiers Science, Technologie, Société, 4, pp 106-126, Paris, CNRS
LAW J. (1987a), CALLON M., The life and death of an aircraft : a network analysis of technical change, International Workshop on the Integration of Social and Historical Studies of Technology, University of Twente, Enschede
LAW J. (1988a), The anatomy of a sociotechnical struggle : the design of the TSR 2, in Elliot B., Technology and Social Process, Edinburgh University Press, Edinburgh, 1988
LAW J. (1988b), CALLON M., Engineering and Sociology in a Military Aircraft Project : A network Analysis of Technological Change, Social Problems, 35(3)
THEVENOT L. (1985), Les investissements de forme, Conventions Economiques, Paris, PUF