"la stabilisation de l’identité du loup n’est construite que chemin faisant" : c’est une infrastructure invisible qui équipe l’indice de présence (poils et fèces du loup). Cela lui permet de jouer un rôle d'objet-frontière dans la coordination des divers acteurs qui ont parfois des pratiques et des intérêts divergents


Granjou Céline et Mauz Isabelle , « Quand l'identité de l'objet-frontière se construit chemin faisant » Le cas de l'estimation de l'effectif de la population de loups en France, Revue d'anthropologie des connaissances, 2009/1 Vol. 3, n° 1, p. 29-49.


"Nous voyons ainsi que des objets intermédiaires peuvent devenir des objets-frontière notamment lorsqu’ils sont équipés, par exemple, de métadonnées, qui rendent possible la constitution d’une équivalence entre des mondes hétérogènes. Cet équipement matérialise dans l’interaction une infrastructure invisible faite de standards, de catégories et de conventions qui permet la circulation d’un monde à l’autre."[...]

"La notion d’équipement permet d’éviter de penser que les caractéristiques de médiation, de traduction, sont attachées à la seule nature de l’objet. Nous faisons l’hypothèse que le passage de l’objet intermédiaire à l’objet-frontière tient justement à ce travail d’équipement. Équipé, l’objet intermédiaire entre dans un espace suffisamment commun à plusieurs mondes sociaux. Dès lors, la structure minimale reconnaissable par les membres de différents mondes serait l’équipement dont l’objet est doté plus que l’objet lui-même. "

Vinck, D. (2009). De l'objet intermédiaire à l'objet-frontière. Revue d'anthropologie des connaissances, 3(1), 51-72.


"[L]es groupes sociaux créent la déviance en instituant des normes dont la transgression constitue la déviance, en appliquant ces normes à certains individus et en les étiquetant comme des déviants".

Becker Howard, 1985. Outsiders. Études de sociologie de la déviance. Paris, Métaillé, 248.

"La “définition de la situation” - grande contribution de W.I. Thomas au vocabulaire et à la pensée sociologique - exige, par exemple, que nous comprenions la manière dont les acteurs voient la situation dans laquelle ils sont impliqués, et que nous découvrions comment ils définissent eux-même ce qui est en train de se passer, afin de comprendre ce qui entre en jeu dans la production de leur activité.

Becker, H. S. (2002). Les ficelles du métier: comment conduire sa recherche en sciences sociales. La découverte.

« Nous ne savons pas de quoi se compose le monde. Ce n'est pas une raison pour ne pas commencer. Car d'autres semblent le savoir et définissent constamment qui sont les acteurs qui les entourent, ce qu'ils veulent, ce qui les cause, ainsi que les moyens de les affaiblir ou de les associer. Les auteurs que nous allons étudier attribuent des causes, datent des évènements, dotent leurs entités de qualités, classent les acteurs. L'analyste n'a pas à en savoir plus qu'eux, il n'a qu'à commencer, en un point quelconque, par enregistrer sans être raisonnable ce chaque acteur dit des autres[...]
Il suffit qu’on ne sache pas quels sont les acteurs, qu’on les laisse s’entre-définir et qu’on suive comment chacun déplace la volonté des autres, en construisant des chaînes de traduction ».
 

Latour, B. (2001). Pasteur: guerre et paix des microbes; suivi de Irréductions. La découverte.

"Tout se passe comme si l'on disait aux acteurs :“Nous n'allons pas essayer de vous discipliner, de vous faire coller à nos catégories ; nous allons vous laisser déployer vos propres mondes ; ce n'est qu'ensuite que nous vous demanderons d'expliquer comment vous êtes arrivés à les établir.” Autrement dit, la tâche de définition et de mise en ordre du social doit être laissée aux acteurs eux-mêmes, au lieu d'être accaparée par l'enquêteur". 

"Un bon texte met au jour des réseaux d'acteurs lorsqu'il permet à celui qui l'écrit de tracer un ensemble de relations définies comme autant de traductions."

Latour, B. (2014). Changer de société, refaire de la sociologie. La découverte.