Où ça ?

Cette entité technique est désormais connu sur une quarantaine de stations. Grâce aux travaux de Michel Tessier, les sites de l’embouchure de la Loire sont particulièrement bien perçus. La petite superficie des habitats, leur espacement régulier sur la côte et l’orientation des chaînes opératoires vers la fabrication de pointes de flèches laissent penser à une exploitation régulière par de petits groupes dans l’estuaire de la rivière de Pornic (Loire-Atlantique) aujourd’hui submergé. Une seule date obtenue sur terre charbonneuse fixe l’occupation de la Gilardière à 6520 ± 120 BP (5601-5242 avant J.-C.).



Fabriquer des outils de pierre

Les matières premières utilisées dans la fabrication des outils lithiques sont toujours d’origine locale, silex roulés d’estrans pour les stations littorales, phtanites et quartzites de Montbert à l’intérieur. Ces derniers parviennent sous forme de rares produits finis en Pays-de-Retz, à 60 kilomètres des affleurements, et c’est une distance maximale enregistrée pour les territoires d’acquisition du Retzien.

Sur les sites de l’embouchure de la Loire, le débitage s’organise en au moins quatre chaînes opératoires, suivant la conformation et la qualité initiale des galets côtiers. La chaîne opératoire intégrée principale comprend une mise en forme restreinte des galets côtiers, au percuteur dur, et le plus souvent un début de débitage laminaire immédiatement à la faveur des convexités naturelles du bloc. Les séquences lamellaires, qui closent cette chaîne, portent un fort investissement technique. L’exploitation des nucleus se fait par des tables assez étroites, avec une méthode frontale, et des séries d’enlèvements convergentes vers le centre de la table en phase finale. Le plan de frappe est entretenu plutôt par éclats que par tablettes totales ; le bord de frappe porte un micro-facettage, qui se traduit sur les produits par un fort taux de talons facettés. La technique de débitage est probablement la percussion indirecte. Les produits sont réguliers, peu arqués (sauf en partie distale) et larges (en majorité à trois pans). Cette réduction progressive du volume fait que les lames sont plus irrégulières que les lamelles. Un débitage d’éclats se distingue nettement des méthodes de la séquence lamino-lamellaire, avec une exploitation des volumes par deux faces à enlèvements centripètes. Le débitage se fait là sans doute par percussion directe dure. L’objectif est d’obtenir des éclats minces a-corticaux, utilisés sans aménagements.

 

Des flèches

Les armatures, fabriquées en priorité à partir des lamelles de plein débitage, déclinent une large gamme de types. A côté des armatures à retouches abruptes armoricaines (trapèzes symétriques et asymétriques, triangles scalènes), il existe de nombreuses pièces à retouches rasantes (armatures du Châtelet et à éperon, trapèzes de la Gilardière) et quelques armatures trapézoïdales peu standardisées. A côté des microlithes traditionnels du Mésolithique final, l’armature du Châtelet vient également rappeler les liens avec le Néolithique ancien méridional. Parmi les autres outils aménagés, on mentionnera les lames à troncature et les éclats denticulés. Les grattoirs sont rares et très peu standardisés. Il existe systématiquement des choppers bifaciaux, souvent à silhouette quadrangulaire.

 

Ça bouge dans l’Ouest !

Par le nombre de types d’armature que l’on y trouve au Mésolithique final, le Centre-Ouest s’oppose nettement à la péninsule armoricaine. La notion « fourre-tout » et souvent vide de sens de région carrefour trouve là peut-être enfin une illustration : il y a entre Loire et Marais Poitevin, une ébullition, une multitude de contacts dans toutes les directions, dont la médiocrité des milieux sédimentaires explorés ne restitue que très imparfaitement l’ordonnance et l’évolution. La situation en Bretagne prend alors des allures d’uniformité. Si l’on mène cette réflexion plus avant, la multiplicité des types d’armatures en Centre-Ouest traduit une stimulation et une affirmation des marqueurs identitaires, tant à l’intérieur du groupe qu’à l’extérieur. Peut-on y voir la marque de sociétés plus guerrières ou plus chasseresses ? De fait, entre Mésolithique récent et Mésolithique final, cette augmentation des types de flèches (du Gildasien au Retzien) est toujours très nette. Il est possible que ce bouillonnement soit lié à la néolithisation, de manière indirecte, si l’on accepte par exemple de lier dans un même mouvement l’affirmation identitaire et la réaction au changement, ou encore, pourquoi pas, si la progression de groupes orientaux et/ou méridionaux avait repoussé divers groupes mésolithiques vers l’Ouest.