Les Chaloignes, un habitat azilien en Anjou
Par Gregor Marchand le mercredi 2 janvier 2008, 20:13 - Sites archéologiques - Lien permanent
Directeur de recherche CNRS / Université de Rennes 1. Archéologue et Préhistorien, spécialiste des industries lithiques du Paléolithique final, du Mésolithique et du Néolithique sur la façade atlantique de l’Europe, avec des terrains en France et au Portugal.
Par Gregor Marchand le mercredi 2 janvier 2008, 20:13 - Sites archéologiques - Lien permanent
Fouille réalisée sous la direction de Grégor Marchand
Avec Rémy Arthuis, Sylvie Philibert, Sylvie Rimbault, Farid Sellami, Sandra Sicard
La découverte du site des Chaloignes (Mozé-sur-Louet, Maine-et-Loire) a eu lieu lors des travaux archéologiques préalables à la construction de l’autoroute Angers /
Après les prospections à la pelle mécanique, puis une évaluation du site à l’aide de tranchées complémentaires, la fouille a été réalisée du 1 avril au 30 septembre 1999, sur une surface de
Les pièces lithiques pouvant être qualifiées d’aziliennes gisent au sein de dix locus homogènes (locus 1, 2, 3, 4, 10, 11 ,12, 13, 21 et 40), de deux zones homogènes (zones 12 et 13) et de deux zones à forte composante azilienne mais à intrusions postérieures (zones 4 et 5). Il y a également un locus daté du Néolithique final (locus 31). Les unités spatiales couvrent de 25 à
L’acquisition du silex sur les sources les plus proches a été la solution la plus couramment adoptée par les tailleurs des Chaloignes. Il s’agit pour l’essentiel de galets de terrasses de
Les objectifs du débitage sont doubles : d’une part, de petits supports laminaires rectilignes à destination des armatures, d’autre part des éclats courts dont l’épaisseur est constante, pour les grattoirs. La mise en forme des blocs est assurée sans crête, au moyen des nervures naturelles des galets de
Les analyses intra-locus peinent à révéler l’organisation spatiale ; l’enregistrement sédimentaire assez faible et les bioturbations ont pu démanteler les discrets signaux d’organisation spatiale. Il est dans ce cas difficile d’interpréter de manière univoque les locus comme des zones de rejets, comme des amas de débitage ou comme des zones d’activités sur place. Les comparaisons inter-locus sont plus riches de sens, même si les remontages inter-locus n’engagent que des pièces des locus 1 et 2. L’ensemble des types d’outils est présent sur tous les locus ; une analyse fine des proportions de pièces permet néanmoins de nuancer cette observation pour nous entraîner vers des notions de segmentation des activités dans l’espace. Il existe en effet des locus qui se rapprochent d’aires de débitage (locus 4, locus 10 et locus 13) et d’autres qui évoquent des espaces de rejet (locus 11, locus 2). Il est enfin possible que certains locus correspondent à des zones d’activités orientées (locus 40, locus 1). Ainsi dans le locus 1, un faisceau d’indices convergent pour signifier une zone de fabrication d’armatures. L’analyse tracéologique menée par S. Philibert a permis de montrer que, hormis les activités cynégétiques dont témoignent indirectement les armatures, les processus techniques identifiés se rapportent essentiellement au travail de la peau et du bois. Une large part des produits lithiques obtenus est abandonnée sur place, sans avoir servi.
Le locus 11 est le seul à avoir livré les galets gravés de fines stries parallèles. Ils sont tous trois en position stratigraphique claire, permettant sans aucun doute de les associer à l’occupation azilienne. Ils illustrent l’existence d’autres préoccupations que les activités de taille et confèrent au locus 11 une autre dimension que celle spécifiquement économique.
A partir des données géomorphologiques, spatiales et technologiques recueillies, il est possible d’esquisser un cadre général pour les manières d’habiter dans la cuvette des Chaloignes, sans pour autant que l’on puisse se risquer à identifier des comportements particuliers. Le fonctionnement des locus est probablement discontinu dans le temps. Ils ont été abandonnés à l’issue d’activités menées par une petite partie du groupe, mais il est impossible de savoir si le reste du groupe occupait le centre de la cuvette ou bien si quelques individus seulement venaient régulièrement aux Chaloignes. Le territoire économique, pour ce que l’on en perçoit par la géographie et les territoires d’acquisition, est marqué par le fleuve, à un vaste carrefour entre plusieurs rivières.
Une révision des assemblages lithiques contemporains du Tardiglaciaire peut désormais être proposée, à partir d’un nouvel inventaire établi pour le Massif armoricain. Il permet d’opposer l’ensemble des industries à pointes à dos courbe et l’ensemble encore protéiforme des industries à pointes à dos rectilignes, distincts dans l’espace. Le second est probablement postérieur à l’Azilien, mais les travaux sur le sujet restent encore bien imprécis.
Rennes, le 2 janvier 2008