De la terminale à la fac: langage et exigence en mathématiques

A la recherche des expressions perdues

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L'expérience faire en 1ère S a montré que les élèves étaient peu habitués à l'emploi d'un "car" dans la dernière phrase d'une démonstration, de nombreux élèèves l'ayant remplacé par un "donc", malgré le peu de sens que cela donnait à la démonstration.

Aussi nous avons voulu voir si les étudiants étaient plus à l'aise par rapport à la position de cette implication "inversée" dans un texte de démonstration. C'est dans cet esprit que nous avons conçu la démonstration à trous : "polynômes de Lagrange", pour le module d'algèbre linéaire de première année. Cette démonstration contenait deux "car", un en début de texte, l'autre introduisant la dernière proposition de notre démonstration.

Ce test a été expérimenté dans quatre groupes de DEUG MIAS première année, un petit groupe ENSI deuxième année, un groupe de licence pluridisciplinaire.

Analyse du premier paragraphe : "Il suffit....car"


Analysons d'abord les mots de liaison utilisés dans le premier paragraphe.

Une proportion importante d'étudiants (73%) a employé une combinaison correcte d'expressions, si l'on ne tient pas compte des erreurs de ponctuation. De manière plus détaillée:

73% d'étudiants

Comme/Puisque/............ R3[X] est un espace vectoriel de dimension 4, pour prouver que la famille {P1, P2, P3, P4} est une base de R3[X],
Il suffit de vérifier qu'elle est libre.
En effet/car/puisque dans un espace vectoriel de dimension 4, toute famille libre de 4 vecteurs est une base de cet espace.

Quelques étudiants, 6%, ont remplacé le "car" par un mot moins approprié, sans inverser toutefois la justification finale. On a pu voir

Comme/Puisque R3[X] est un espace vectoriel de dimension 4, pour prouver que la famille {P1, P2, P3, P4} est une base de R3[X],
Il suffit de vérifier qu'elle est libre.
et/or dans un espace vectoriel de dimension 4, toute famille libre de 4 vecteurs est une base de cet espace.

Seulement 8,6% d'étudiants ont inversé la justification finale en écrivant :

4.6% d'étudiants avec "il suffit"

Comme/Puisque R3[X] est un espace vectoriel de dimension 4, pour prouver que la famille {P1, P2, P3, P4} est une base de R3[X],
Il suffit de vérifier qu'elle est libre.
ainsi/donc/par conséquent dans un espace vectoriel de dimension 4, toute famille libre de 4 vecteurs est une base de cet espace.


4% d'étudiants avec "il faut"

Comme/Puisque/Si R3[X] est un espace vectoriel de dimension 4, pour prouver que la famille {P1, P2, P3, P4} est une base de R3[X],
Il faut vérifier qu'elle est libre.
ainsi/donc/par conséquent dans un espace vectoriel de dimension 4, toute famille libre de 4 vecteurs est une base de cet espace.


Les 15% d'étudiants qui ont inversé l'implication en remplaçant "il suffit" par "il faut" se sont partagés sur la justification finale.

Comme/Puisque/Si R3[X] est un espace vectoriel de dimension 4, pour prouver que la famille {P1, P2, P3, P4} est une base de R3[X],
il faut vérifier qu'elle est libre.
puisque/en effet (5%)
or/de plus (6%)
ainsi (4%)
dans un espace vectoriel de dimension 4, toute famille libre de 4 vecteurs est une base de cet espace.


On peut remarquer que sur ce paragraphe, situé en début de démonstration le taux de réussite est assez bon. Il faut dire que cette expérience était au second semestre et le premier semestre comporte un module de méthodologie dans lequel on insiste sur le vocabulaire utilisé en démonstration.

La justification finale

La suite du texte était rédigée de telle manière que la proposition finale soit une justication de ce qui précédait.

Soient λ1, λ2, λ3 et λ4 des nombres réels tels que

λ1P12P23P34P4=0.

Or, on sait que, si P est le polynôme nul, alors pour tout réel a, on a P(a)=0. D'où, en prenant X=0, on obtient

λ1.0+λ2.0+λ3.0+λ4.(-6)=0.

Donc λ4=0. De même, en prenant successivement X=1, on trouve λ3=0, puis X=2, λ2=0, enfin X=3, λ1=0. Par conséquent λ1234=0. Ainsi, ces quatre polynômes forment une base de R3[X], car ils forment une famille libre de R3[X].


La phrase finale donnait la conclusion avec sa justification et la réussite pour cette justification a été beaucoup moins importante qu'au début du texte : 55% au lieu de 79% pour la justification dans le premier paragraphe. Rappelons que seul 41% d'élèves avaient réussi, en première S, pour une justification introduite par un "car", en fin de texte. Ceci montre les progrès réalisé par les étudiants au fil des années!

55% d'étudiants avec "car''

Ainsi/Par conséquent/D'où/Alors/En effet ces quatre polynômes forment une base de R3[X]
car/puisque/comme/en effet ils forment une famille libre de R3[X].

13.5% d'étudiants avec "et''

Ainsi/Par conséquent/D'où/Donc ces quatre polynômes forment une base de R3[X]
et ils forment une famille libre de R3[X].

31.5% d'étudiants avec "donc''

Ainsi/Par conséquent/Donc/Et/En effet/Puisque ces quatre polynômes forment une base de R3[X]
donc/d'où/alors/par conséquent ils forment une famille libre de R3[X].


On peut émettre quatre hypothèses pour expliquer cette différence.

Pour voir si les deux dernières hypothèses étaient fondées, nous avons renouvelé le test en fin d'année. Le nombre d'expressions manquantes a été réduit. La démonstration se termine encore par une justification. Les propositions utilisées rendaient plus difficile l'erreur de remplacer le "car" par "et" ou par "donc". Le dernier paragraphe comporte également l'expression "il suffit":

On en déduit Im(u)=Rn[X]. Par conséquent u est surjective, donc c'est un isomorphisme de Rn[X], car, pour qu'un endomorphisme d'un espace vectoriel de dimension finie soit un isomorphisme il suffit qu'il soit surjectif ou bien injectif.

On constate sur ce texte, que le "car", en fin de texte, a été moins remplacé par un "donc" (7,5%) que dans l'expérience précédente, (31%). Par contre cette erreur se trouvait avec la même fréquence en début de texte (8%) dans l'espérience précédente.

Cependant les tournures correctes "car" ont été très peu fréquentes (40%). Le niveau est comparable à celui observé en première S.

Pour ce qui est de l'emploi de "il suffit", on constate aussi une moins bonne performance, à niveau égal, lorsque cette expression est située en fin de texte.

Au milieu de la démonstration de première S, le taux de succès était de 55%. Dans le premier texte, à l'université, en début de texte on a obtenu un taux de réussite de 85. Mais pour le dernier test, fait en fin d'année, situé en fin de texte, le taux de réussite est redescendu à 62%. Suite...