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Le texte suivant a été proposé à 13 étudiants de DEUG 2e année MIAS et SM préparant le concours national d'entrée dans les grandes écoles d'ingénieurs.
Le problème: résoudre dans R l'équation √(x2-2x)=x-3.
Que pensez-vous du raisonnement suivant:
La racine carrée doit être définie donc x2-2x≥ 0, d'où x∈ ]-∞,0]∪[2,+∞[.
On élève au carré et on obtient x2-2x=(x-3)2=x2-6x+9 d'où x=9/4, or 9/4 ≥ 2, donc l'équation a une unique solution qui est x=9/4.
3 étudiants ont trouvé l'erreur:
L'un d'entre eux regarde si la solution trouvée est bien solution de l'équation de départ.
→ En vérifiant dans l'équation x=9/4 √(81/16-9/2)=√(9/16)=3/4 x-3=9/4-3=-3/4. Donc x=9/4 ne vérifie pas l'équation. → La valeur obtenue de x doit être supérieure à 3. |
Les deux autres affirment directement qu'une racine étant positive, x doit être supérieur à 3, ce qui n'est pas le cas de 9/4.
Une racine doit être positive donc x-3≥ 0, x≥ 3, x ne peut pas appartenir à ]-∞,3[. Or 9/4∈ ]-∞,3[ donc 9/4 n'est pas solution de l'équation |
√(x2-2x) ≥ 0 donc il est nécessaire d'avoir x-3≥ 0 soit x≥ 3 donc x=9/4 n'est pas solution de l'équation. |
5 étudiants pensent que le raisonnement est juste, après vérification des calculs à chaque ligne:
x2-2x=(x-3)2>0 car x2-2x≥ 0 x2-6x+9=0, Δ =0, alors le polynôme admet une et une seule solution x=9/4 appartenant à [2,+∞[ d'où 9/4≥ 2 donc il n'y a qu'une unique solution x=9/4. Le raisonnement est bon. |
La racine carrée doit être définie donc x2-2x ≥ 0 d'où x∈ ]-∞,0] ∪[2,+∞[. vrai On élève au carré et on obtient x2-2x=(x-3)2=x2-6x+9 d'où x=9/4,vrai or 9/4≥ 2, donc l'équation a une unique solution qui est x=9/4. vrai x2-2x-x2+6x-9=0 4x=9 x=9/4 |
Les 5 autres étudiants estiment le raisonnement incorrect, mais parce qu'il manque des racines.
on a élevé l'équation au carré alors x=∓√(9/4)=∓3/2 |
x=9/4 9/4≥ 0⇒ x=∓ 3/2 or +3/2 n'appartient pas à l'intervalle des solutions ⇒ unique solution x=3/2 |
x=9/4 n'est pas forcément une unique solution, car en élevant au carré, on peut avoir transformé une solution négative en solution positive |
x2-2x ≥ 0 ⇒ x(x-2)≥ 0 ⇔ x∈ ]-∞,0] ∪ [2,+∞[ OK x2-6x+9=x2-2x ⇔ 0=4x-9 ⇒ x=9/4 ≥ 2 Mais il faut également prendre la solution négative x=-9/4 ≤ 0 |
x2-2x ≥ 0 ⇔ x(x-2) ≤ 0 ⇔ x ∈]-∞,0]∪[2,+∞[ oui x2-2x=(x-3)2=x2-6x+9 ⇔ x=9/4 ≥ 2 il faut prendre en compte -9/4 aussi |
Trois des étudiants ont vu et montré que la "solution'' proposée était fausse. Mais, pour ce faire, ils se contentent de constater que la valeur 9/4 trouvée ne convient pas:
A la suite de ce test, nous avons entamé une réflexion sur la façon de résoudre ce type d'équations et d'en rédiger la démonstration.
Chacun des membres du groupe a proposé une ou plusieurs rédactions d'une résolution de la même équation √(x2-2x)=x-3, Consulter ces rédactions. (pdf)
L'analyse des démonstrations proposées par les membres du groupe montre qu'il y a essentiellement deux types de rédactions:
Pour l'équation (E): √(x2-2x)=x-3, on peut sans inconvénient majeur se passer de D parce que la raison pour laquelle 9/4 n'est pas solution de (E) n'est pas que 9/4∉ D (en fait 9/4∈ D) mais que 9/4 est solution d'une équation (E'), qui n'est pas équivalente à (E), obtenue en élevant (E) au carré (à savoir x2-2x=(x-3)2) ce qui a pour effet de faire disparaître la contrainte x-3 ≥ 0 et donc de faire apparaître la `"fausse solution'' 9/4.
Dans la méthode par "implication/vérification'', lors de la partie x=9/4, x-3 n'est pas positif, donc ne peut pas être égal à une racine carrée.
Dans la méthode avec équivalence, c'est la condition x-3 ≥ 0 de la dernière équivalence qui permet d'écarter 9/4.
On pourrait donc penser que l'introduction de l'ensemble de définition ne présente pas d'intérêt majeur. Mais l'étude d'autres équations montre qu'on ne peut pas toujours s'en passer comme le montre l'exemple suivant:
Exemple:
En voici une résolution par "implication/vérification'':
supposons que x soit solution de (E1). Alors, en élevant au carré et en effectuant, on obtient:
d'où x=3. Ceci montre que x=3 est la seule solution possible. Mais, pour x=3, (x-1)(x-4) vaut -2 donc 3 ∉ D1, ensemble de définition de x → √((x-1)(x-4)). En fait, si D2 est l'ensemble de définition de x → √((x-2)(x-5)), on a 3 ∉ D1∩ D2=D, ensemble de définition de (E1).
Dans cette équation (E1), en élevant au carré, on fait disparaître les contraintes du type f(x) ≥ 0 dans les termes √(f(x)), i.e. les contraintes portant sur D. Il en résulte qu'il peut apparaître de "fausses solutions'' et l'obstacle pour qu'elles soient solutions de (E1) est, cette fois, qu'elles peuvent ne pas appartenir à D.
En d'autres termes, le problème de fond pour la résolution de (E1) est l'ensemble de définition.
Autre exemple:
La méthode préconisée dans les manuels de lycée est du type suivant:
Conclusion.
(E1) | ⇔ |
| ⇔ |
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et la dernière condition, de fait équivalente à x∈ D1, introduit D sans le dire clairement.
De plus, on pourra ainsi mettre en évidence que les raisons qui permettent d'écarter les fausses solutions peuvent être liées à D ou non.
Ajoutons que, dans une méthode par équivalence, de par son extrême concision, certaines conditions à écrire pour avoir un ''système'' équivalent à l'équation initiale peuvent être difficiles à comprendre et plus encore à déterminer pour les élèves qui risquent d'en oublier et de donner des solutions fausses.
Exemple:
√(x2-2x)=x-3 | ⇔ |
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Cette équivalence n'est sans doute pas évidente pour beaucoup d'élèves (ni d'ailleurs la référence à D).
En contrepartie, la compréhension de cette équivalence a un effet formateur certain. Il peut donc être utile de signaler ce type de rédaction.
Dans la solution par "implication/vérification'', les élèves oublient souvent la partie vérification. La raison peut être liée à la formulation de la proposition: "si x est solution, alors x=9/4'', qui est démontrée dans la partie "implication".
Pour les élèves, écrire "si x est solution'' signifie que x est effectivement solution et la deuxième partie de la démonstration, consistant à vérifier que la valeur 9/4 trouvée dans la première partie est solution, n'a pas lieu d'être.
Pour combattre cet effet néfaste du langage, nous proposons deux "améliorations" de la rédaction:
La rédaction du type 'implication/vérification' contient une difficulté de nature logique. En fait, la première partie démontre une propriété du type:
dont on sait qu'elle est vraie lorsque A et B sont toutes les deux vraies mais aussi lorsque A est fausse. Dans la pratique, pour rédiger la démonstration d'une telle proposition, on écrit:
est vraie. On rencontre rarement cette situation dans le langage courant. Cela explique peut-être la difficulté pour les élèves à admettre la nécessité de vérifier que 9/4 est effectivement solution.